Les mangroves
Rhizophora sp.
Le genre Rhizophora appartient à la famille des Rhizophoracées. C'est dans cette famille des palétuviers que l'on trouve les espèces qui dominent largement les mangroves. Ce genre est représenté par un petit groupe d'espèces qui se répartissent sur toute l'aire géographique colonisée par les mangroves.
La répartition : Le groupe d'espèces et d'hybrides appartenant au genre Rhizophora qui ont colonisé les côtes Indo-Malaise comprend R. x annamalayana, R. apiculata, R. x lamarckii, R. mucronata et R. stylosa. R. apiculata pousse au Sri-Lanka, sur les côtes des îles du sud-est asiatique et du Pacifique ainsi que dans le nord de l'Australie. L'hybride R. x lamarckii est beaucoup plus rare que les espèces mentionnées, toutefois, il possède une bonne répartition allant des Indes aux îles du sud-est asiatique. C'est R. mucronata qui a la plus large répartition de tout le groupe. Elle pousse sur les côtes d'Afrique de l'est, du sous-continent indien, de toute l'Asie du sud-est, du sud de la Chine et de l'île Ryukyu au Japon, des îles du Pacifique et du Queensland en Australie. R. stylosa se trouve dans le sud-est asiatique, les îles du Pacifique, au nord de l'Australie, au sud de la Chine ainsi que dans l'île de Ryukyu. L'hybride R. x annamalayanna est présent uniquement en Inde et au Sri-Lanka.
Description des espèces : Ces espèces de Rhizophora sont des arbres érigés en hauteur et pouvant mesurer jusqu'à 30-40 m. dans le cas de R. mucronata. R. stylosa est en revanche beaucoup plus petit que ses consurs en ne mesurant guère plus de 10 m. Pour se maintenir à une telle taille, ces arbres sont maintenus par des racines-échasses qui poussent du tronc ou des branches dans le sens de la pesanteur pour se planter dans la vase. L'arbre ainsi maintenu peut se dresser sans crainte dans ce milieu glissant. Le tronc des palétuviers, notamment chez R. x lamarckii peut être rétréci sous les premières racines-échasses. Ces racines-échasses atteignent jusqu'à 5 m. de haut chez R. apiculata, R. x lamarckii et R. mucronata. Elles sont plus petites chez R. stylosa. Certaines de ces espèces possèdent également des racines aériennes plus étroites qui poussent des branches et tombent comme des cordelettes. Elles permettent de capter l'humidité et l'oxygène.
La couleur de l'écorce varie d'une espèce à l'autre. Elle est brune claire voire grise foncée chez R. x lamarckii, grise foncée chez R. apiculata, rougeâtre voire grise claire chez R. stylosa et foncée à noire chez R. mucronata.
Les stipules sont rougeâtres, sessiles, et ressemblent à des feuilles lancéolées. Les feuilles de Rhizophora sont simples et opposées, coriaces avec un aspect cireux à la surface du limbe et portées sur un long pétiole. La couleur du limbe est verte foncée et ponctuée de taches noires. Chez R. x lamarckii la couleur des feuilles est plus claire, presque jaune, et elles sont ponctuées de taches beaucoup plus fines et contrastées. Les feuilles de ces espèces de Rhizophora sont toutes elliptiques bien que chez R. stylosa elles ont une forme qui peut paraître obovale et chez R. mucronata, oblongue. L'aspect de l'apex des feuilles a donné son nom a plusieurs espèces telles que R. apiculata ou R. mucronata. En effet, ces feuilles se terminent en pointes acuminées, mucronées voire acutes (aigues).
Les inflorescences poussent à l'axe des feuilles. Elles se présentent en forme de fourche chez R. mucronata et R. stylosa. Mais, ce qui distingue vraiment ces espèces entre elles, c'est le nombre de fleurs par inflorescence. Il y en a deux dans le cas de R. apiculata et R. x lamarkii, plus que deux jusqu'à 5 chez R. mucronata et jusqu'à une trentaine chez R. stylosa.
Les fleurs sont portées par des bractéoles en forme de coupes unies et soudées entre elles à la base. Les bractées sont brunes-rouges et ligneuses chez R. apiculata et vertes-jaunes-crémeuses et souples chez R. mucronata. Cette différence est un bon facteur de détermination entre ces deux espèces. Chez R. stylosa et R. mucronata elles sont vertes-jaunes. Les lobes du calice sont au nombre de quatre et mesurent environ un centimètre voire légèrement plus. Ils sont lancéolés et sont arrangés en forme d'oeufs. Ils peuvent aussi être repliés vers l'arrière avec l'apparition du fruit.
Les pétales sont au nombre de quatre fixés en alternance avec le calice. Leur taille avoisine ou est légèrement inférieure à un centimètre. Ils sont lancéolés avec le rebord légèrement incurvé dans le cas de R. x lamarkii. Ils sont de couleur blanche voire légèrement jaune et ont une texture plutôt membraneuse. Les pétales de R. mucronata et R. stylosa sont pubescents tandis que ceux de R. apiculata et R. x lamarckii sont glabres. La fleur comporte 8-12 étamines. Les anthères sont sessiles ou presque chez R. apiculata, R. x lamarckii et R. mucronata, en revanche, il est porté sur un filament bien distinct dans le cas de R. stylosa. Ce qui en fait un bon facteur de détermination. De plus, le style de cette espèce avec ses 4-6 mm. de long est 4 fois plus long que celui de ses consoeurs.
Le fruit est brun, ovoïde voire conique, et mesure environ 6 cm de long pour un diamètre d'environ 3 cm. chez R. mucronata. Il mesure environ 2.5 et 4 cm de long chez les autres espèces. Chez, R. x lamarckii, le fruit est difficilement perceptible après maturité. Il n'y a qu'une seule graine fertile par fruit. L'hypocotyle est très allongé cylindrique et peut mesurer jusqu'à une quarantaine de centimètre. Son apex est acute (aigu).
La pollinisation : Les fleurs sont inodores et produisent une grande quantité de pollen. L'absence de parfum et de nectar et la présence d'une grande quantité de pollen souligne une pollinisation par le vent. Ce mode de pollinisation n'évite pas les croisements mono spécifiques.
La viviparité : Les fruits de Rhizophora sp. ne contiennent qu'une seule capsule. Les plantules de ces espèces germent lorsque le fruit se trouve toujours attachés aux arbres et prennent( ?) la forme d'une propagule. Ainsi la nouvelle plantule continue d'être alimentée par la plante mère et de bénéficier directement des apports nutritifs en sucre et sels minéraux dans un milieu protégé. Cette méthode appelée viviparité est responsable des longues et fines propagules vertes qui poussent hors des capsules brunes-foncées des fruits. Il s'agit en fait des hypocotyles qui poussent tout en longueur et se présentent sous forme épaisse, charnues et solide.
La dispersion : Lorsqu'il se sépare de l'arbre mère pour finalement tomber dans la mer, ce propagule bâti tout en longueur agit comme une barque. Il va pouvoir flotter ainsi pendant plusieurs semaines. Puis, l'une des extrémités du fruit va progressivement s'imbiber d'eau comme une éponge, s'alourdir et graduellement couler tandis que l'autre partie flotte toujours à la surface. Le fruit flotte alors à la verticale et sa longueur va lui permettre de diminuer la distance entre le sol et la surface. Lorsqu'il touche le sol, par le jeu des marées ou en s'approchant de la côte, le fruit pourra gentiment s'enfoncer dans la vase. Alors, des racines vont germer de la partie immergée pour ancrer la plantule dans ce sol et une tige et des feuilles vont pousser de la partie aérienne. La plante pousse alors de préférence dans un milieu argileux et possède une croissance rapide. En une année, elle peut déjà avoir crû de plus d'une soixantaine de centimètres. Les propagules de l'hybride R. x lamarckii croissent mal. En revanche, la plante se reproduit facilement par bouturage ou reproduction végétative.
L'oxygène : Les racines de Rhizophora ne lui permettent pas seulement de s'ancrer dans la vase, mais elles ont aussi l'avantage d'être perméables à l'air. Toute la partie supérieure des racines ainsi que le tronc et les racines aériennes qui descendent en rubans des branches possèdent cette caractéristique. Ce système permet à l'arbre de « respirer » dans ce milieu anoxique. Les racines possèdent encore un système d'ultrafiltration qui lui permet d'expulser le sel. Et, si toutefois du sel parvenait à s'infiltrer, il est alors stocké dans les vieilles feuilles avant qu'elles ne tombent.
Ecologie : Les espèces de Rhizophora poussent dans les estuaires maritimes, exposé à la mer, dans des sols ou la vase est profonde et inondés à marée haute. Ceci est particulièrement vrai pour R. apiculata qui évite tout sol chargé de matériaux durs. Dans ces sols, cette espèce peut être à plus de 90% largement dominante. R. x lamarckii et R. mucronata peuvent se retrouver côte à côte avec R. apiculata, mais elles auront plus de facilité à coloniser des espaces plus sablonneux. R. mucronata va toutefois favoriser un milieu soumis à un apport régulier d'eau douce. R. stylosa est beaucoup plus ubiquiste, elle peut pousser dans la vase, le sable, un sol pierreux et elle s'est même spécialisée à pousser sur les débris de coraux des petites îles coralliennes.
Usages : Si certaines espèces de mangrove fournissent un excellent miel, celui produit par le pollen des fleurs de Rhizophora est poison. Les fruits et les jeunes pousses R. mucronata sont consommés cuits en Inde. Le jus de ces fruits sert à la fabrication d'un vin doux. Des extraits de jeunes plantules sont indiqués pour traiter l'hémorragie en Indochine ainsi que la diarrhée, le diabète, la dysenterie en Chine. Les vieilles feuilles et les racines sont utilisées pour soulager les accouchements chez les Malais. L'écorce est employée pour le traitement de sang dans l'urine. Autrement, le bois peut être utilisé pour la fabrication de charbon.
Bibliographie
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